mercredi 30 mars 2011

Autopsie d’un meurtre : Jazz ! Justice !? Et cinéma !

Je ne suis pas un grand spécialiste du vieux cinéma américain. Je ne le suis pas du tout même. Eh bien tant mieux ! Le film dont je vais vous parler a beau dater de 1959 et être en noir et blanc, il n’en demeure pas moins résolument actuel.

C’est en quelque sorte le hasard qui m’a fait mettre la main dessus. Je l’ai obtenu en bénéficiant d’une offre dans une librairie Dalloz (Maison d’édition spécialisée dans les bouquins de Droit, souvent très lourds et toujours trop chers). Ce jour-là je suis reparti de la boutique avec 150 euros en moins dans mon porte-monnaie pour deux bouquins que je ne me souviens pas avoir lus, ni même feuilletés et ce DVD. Offert. Ils ont l’esprit de largesse chez Dalloz.

J’ai attendu des mois la soirée pourrie où de toute façon je n’aurais rien d’autre à me mettre sous la dent pour le regarder. Erreur de jugement et d’appréciation ! C’est un film à voir au plus vite. Otto Preminger (que j’avoue avoir découvert à cette occasion) nous livre là un regard saisissant sur un procès criminel aux Etats-Unis.

Paul Biegler, un avocat aux ¾ à la retraite (interprété par un James Stewart magistral) préfère passer son temps à la pêche ou à écouter du jazz en buvant des coups avec Parnell McCarthy, son vieux confrère sympathiquement alcoolique plutôt que de s’occuper de faire tourner son cabinet.

Seulement voilà, un jour le destin lui tombe dessus et lui soumet le genre d’affaire qu’on ne peut pas refuser.

Laura Manion, une jeune femme jolie et séduisante revient un soir chez elle dépoitraillée, haletante et plaintive. Son mari lui tire les vers du nez… Elle s’est faite violée par le patron du bar où elle a passé la soirée à jouer au billard avec les hommes qui s’y trouvaient. 3 balles dans le buffet. Ce sera le prix à payer pour avoir touché à sa femme. Cette dernière fait appel à notre avocat pantouflard pour défendre son mari.

(James Stewart)
Je ne vous ai rien raconté. A partir de là, le procès commence et le film avec. Et quel procès ! Jamais (de mémoire de jeune blanc bec) le cinéma n’a montré le déroulement d’un procès à l’américaine avec autant de tact et de finesse.

Car il faut saluer le talent de Preminger pour saisir toute cette diversité et cette complexité dans les personnages.

Le cinéma dévoile ici ce que les dossiers criminels comportent d’abord et avant tout : des hommes et des femmes complexes qui tissent entre eux des relations complexes qui sont animés par des sentiments complexes et qui nous font ressentir toute la contradiction inhérente à l’humain. Que les esprits binaires s’abstiennent !

Enfin une victime qui présente un visage différent de celui de l’agneau pascal que certains d’entre vous vont bientôt dévorer avec délectation en se léchant les babines, à l’instar du loup après s’être jeté sur sa proie.

Enfin un accusé qui nous est peu sympathique mais que l’on a tout de même envie de voir libre pour des raisons légales et de circonstances.

Et tout cela, sans toutefois tomber dans le piège de la sur-complexité psychologique. Nous sommes au cinéma, il faut donc transiger avec le réel. Les personnages ne sont « que » des personnages avec juste ce qu’il faut de caricature, d’héroïsme et d’anti héroïsme pour en faire un huit clos haletant.

Pour finir, la cerise sur le gâteau : la bande originale du film est signée Duke Ellington qui nous fait même l’honneur d’une apparition. Ce n’est pas pour rien que le film a reçu le Grammy Award de la meilleure Bande originale de film en 1959.

Quand le jazz fait corps avec le cinéma…


Autopsie d'un Meutre (1959)


Maxime D.




mardi 29 mars 2011

Apocalypse

Un titre choc à prendre au premier degré pour un documentaire édifiant.

Je le dis d’emblée : non, il ne s’agit pas d’un énième documentaire sur la Seconde Guerre Mondiale. Cela fait deux fois maintenant que je le visionne et mon sentiment est constant : s’il fallait n’en garder qu’un seul sur le sujet, ce serait celui-là, assurément.

Isabelle Clarke et Daniel Costelle, les coréalisateurs nous donnent  à voir des images inédites, d’une exceptionnelle pertinence et de grande qualité sur cette tragédie qui a touché le monde il y a quelques décennies.

Ici, on met de côté les fantasmes sur le déroulement des évènements et les préjugés hâtifs sur l’état psychologique des peuples qui ont belligéré pendant quatre interminables années. Point de jugement donc ? Pas vraiment. Le documentaire ne revendique pas un pseudo objectivisme que d’aucuns invoquent pour aborder les sciences humaines. Bien au contraire, ce documentaire est riche parce qu’il aborde la guerre avec un regard multiple, celui de l’individu et de la foule, du politique et du militaire, de la doctrine et de la réalité, de l’horreur et de l’espoir, et ce, dans tous les camps.

C’est l’humanité toute entière au plus profond de ses turpitudes qui est le véritable objet de ce documentaire. Celui-ci est exceptionnel parce qu’il est plurisubjectif et polymorphe. Aucun point de vue n’est laissé pour compte. Vous voulez comprendre la guerre ? Alors il faudra la regarder du présupposé « bon côté », mais aussi du côté de vos faiblesses et du côté de « l’ennemi », celui que vous abhorrez et qui pourtant, est bien votre semblable.   

Pas d’onanisme ici ! Si nous sommes là, c’est au nom de l’histoire, pour qu’elle soit dite, sous toutes ses formes.

Et puis, il y a la voix de Kassovitz qui nous guide et nous enseigne pendant ces cinq heures. Il nous conduit avec professionnalisme à travers ces explosions de terreur et d’effroi. Kassovitz le professeur, celui qui transmet, grave et pédagogue. On l’écoute avec passion et respect parce qu’il nous fait prendre conscience de la dimension et de la teneur des évènements qu’il relate.

Enfin, il y a la colorisation des images. Sensationnel. Il y a là un travail méticuleux qui se compte probablement en centaines d’heures. Le résultat est remarquable. En fait, le voilà le véritable argument de ce documentaire. La colorisation des images nous donne l’effet d’une bombe, au sens propre, comme au sens figuré. 

Fini les images ternes et grisâtres de la guerre qui nous permettaient de nous réfugier dans le confort de nos canapés pour ne pas voir la réalité de ce qu’elle est. C’est un choc absolu. L’horreur est bien de ce monde. Et chose encore plus frappante : depuis 70 ans, nous sommes les mêmes ! Qu’est-ce qui a changé ? La mode ? Si peu. La technologie ? A peine : les voitures ne sont plus des rectangles sur roues, elles ont des « lignes » courbées et le téléphone portable a fait son apparition. Bref, matériellement, rien n’a changé.


Est-ce le problème ? Pas vraiment, à condition de ne pas passer à côté de ce que nous montre toute cette couleur : la part d’histoire qui fait partie de notre temps, de notre époque. Elle est contemporaine et probablement intemporelle.

Cette histoire est la notre parce, qu’elle émane d’une partie de l’essence de l’humain : l’horreur. Ces images nous crèvent les yeux parce qu’elles nous montrent à quel point nous sommes tous, tour à tour intrinsèquement oppresseurs et opprimés.  


C’est le poids de la Guerre qui est en chacun de nous et qui nous brûle les yeux à travers ces images d’une rare intensité. Si nous en prenons conscience et que nous acceptons de le porter, alors, nos yeux pourtant si fragiles renaîtront comme des bourgeons au printemps. Ils seront bleus, comme l’espoir, comme l’océan.

Maxime D.


Kalifornia before Californication


Quinze ans avant la série Californication, David Duchovny (Brian Kessler) découvrait déjà les joies du journalisme et de l’écriture. Accompagnée de sa petite amie Michelle Forbes (Carrie Laughlin), il décide de partir à la poursuite des anciennes gloires américaines des meurtres en série. Rien de plus intéressant qu’un roman sur les tueurs en série de l’Amérique profonde pour faire connaître sa plume. Mais voilà qu’il fait la connaissance de Brad Pitt, alias Early et de sa petite amie Juliette Lewis (Adèle Corners). Tous deux vivent dans une roulotte, chichement. Tous distinguent les deux couples. A par, l’envie de voyager.

Très vite, Brian perçoit en Early quelque chose de différent, quelque chose qu’il n’a jamais vu ailleurs. Il propose au couple de se joindre à lui et sa compagne dans leur périple. Sans un sou, Adèle et Early se prennent au jeu et partent à la découverte de ces assassins du passé américain. Brian, trop obnubilé par son livre, va très vite se rendre compte que la fascination qu’il voue à Early est, en fait, étroitement liée à son sujet de prédilection, l’instinct meurtrier.


Road Movie méconnu, Kalifornia (1993) est un film détonnant. Dans son premier grand rôle, Brad Pitt fait étalage de tout son talent. Meurtrier grossier, sale, dérangé et violent, il porte le film à lui tout seul qui manque, par moment, de rebondissement et souffre de quelques longueurs.

Kalifornia n’en reste pas moins un très bon thriller, augurant la montée d’un talent prometteur, d’une future star qui confirmera au fil des années et des films que Kalifornia n’était pas seulement un film parmi d’autres, mais un tremplin de qualité.






Diego C.



Kalifornia
Bande annonce vo publié par CineMovies.fr - Les sorties ciné en vidéo

dimanche 27 mars 2011

Braquo, une série digne du cinéma


Petit aparté sur ce blog. Il ne s’agit plus d’un film mais d’une série. Une série qui a pourtant toutes les allures d’un film. Mieux encore, la série propose 8 épisodes de 45 minutes environ. Bien plus que ce que proposerait un film.

Comme bien souvent dans notre univers télévisuelle, Canal + se différencie par la qualité des séries et films qu’elle parraine ou produit. De quoi distinguer encore davantage la chaîne cryptée de ses médiocres concurrents.

Depuis sa création, Canal + a fait du cinéma et du sport ses chevaux de bataille, ses leitmotivs. Une orientation stratégique qui n’a cessé de porter ses fruits, malgré quelques déboires et insuccès.

Il faut dire que la production artistique du groupe est florissante. Elle s’inscrit dans un souci permanent d’authenticité et d’originalité, faisant de chacune de ses séries, un événement à part entière.

Carlos en est un exemple remarquable!

Mais Braquo n’a rien à lui envier. Son succès tient davantage au bouche-à-oreille qu’à une véritable promotion massive.



Qu’il me fut rare de voir une série aussi saisissante, aussi violente et aussi haletante que Braquo ! Qu’il me fut rare de voir une série, française qui plus est, aussi bien, tout simplement ! Le résultat n’est pourtant pas dû au hasard.

A l’instar de ses consœurs américaines, cette série s’est dotée des atouts nécessaires au succès. Plus question d’acteurs prometteurs ou novices, plus question de réalisateur amateur. Braquo est une série pour petit écran, mais son environnement relève davantage du septième art. Réalisateur confirmé (Olivier Marchal), acteur chevronné et expérimenté (Jean-Hugues Anglade) ou étoile naissante (Nicolas Duvauchelle), tout se prêtait au succès. La série a d’ailleurs largement devancé les espérances qu’on lui devinait. Pas étonnant au vue du Pilote d’une rare intensité.

Suite au suicide d’un de leurs collègues impliqués dans des affaires scrupuleuses, quatre flics de la PJ enfreignent la loi pour prouver son innocence.

Dès la première minute, le spectateur plonge dans un univers policier pesant. Une violence physique et psychologique qui se perpétue tout au long des huit épisodes. Chaque épisode s’égrène énergiquement. Le caractère de chaque personnage se révèle au fur et à mesure. Les dialogues frustes nourrissent le climat délétère de la série et renforcent sa nervosité. Bref, il ne vous suffira que d’une petite semaine pour achever la première saison dont la diffusion s’est terminée il y a plus d’un an et demie.

Et c’est là que le bât blesse puisque la première saison consommée, vous vous précipiterez vers la deuxième… dont le tournage vient à peine de débuter ! Autant dire que sa diffusion n’est pas prévue avant 2012 ! Trop long !
Armez-vous de patience !

Diego C.


jeudi 24 mars 2011

Bienvenue à Hollywood !


Je ne sais pas ce qui m’a poussé à voir ce film. Peut-être son réalisateur. Peut-être le fait qu’il soit interdit en France. Peut-être parce qu’il a contribué à l’un des plus grands drames de l’histoire. Peut-être parce qu’à la même époque, Chaplin contre –attaquait avec le Dictateur.
Certes, l’enseignement qui m’a été dispensé jusqu’à présent et les événements qui suivirent la sortie du film, me permettent d’avoir le recul nécessaire pour ne pas y adhérer. Mieux, ils me permettent, aujourd’hui, d’en déceler les subtilités sournoises, les artifices insidieux et la logique chafouine qui s’y dissimulent. Mais je ne peux m’empêcher de penser qui si je n’avais pas été averti, j’aurai peut-être succombé aux mensonges que le film régurgite et les aurai approuvés voire même, défendus.

Parce que Goebbels a fait de la propagande un art, du cinéma une arme, et qu’il l’a fait avec les richesses dont il regorge, Jud Süß (Juif Suss en français, 1940) n’est pas seulement un fatras de calomnies abjectes, il est une œuvre. Une œuvre minutieusement ficelée, admirablement bien jouée et atrocement réfléchie. Jud Süß suggère plus qu’il ne dénonce, il insuffle plus qu’il n’accable.
Tout fut fait de manière perfide et le résultat en fut d’autant plus édifiant.
Jud Süß fut l’un des plus grands succès cinématographiques de l’Europe en termes d’affluence et il reste aujourd’hui le symbole même du pouvoir cinématographique. « Le mensonge cesse d’être mensonge dans l’instant où il réussit » disait Paul Nougé dans les lèvres nues. Goebbels et Hitler le savaient. Ils le savaient si bien que la somme dépensée pour ce film dépassa largement ce que le Hollywood de l’époque n’osait imaginer. Pour que le mensonge passe, il fallait sans donner les moyens.
A l’instar de Georges Duroy dans Bel-Ami, Süss Oppenheimer est un homme ambitieux, matérialiste, arrogant, jusqu’ « au boutiste », pervers, arriviste même. Mais Süss Oppenheimer est surtout juif. Par une multitude de subterfuges laudatifs, il va, peu à peu, s’attirer les grâces du duc de Stuttgart afin de mieux s’en servir pour corrompre la ravissante et pure société allemande.
Emblème de la propagande nazie, Jud Süß interpelle. Je ne demande pas à ce que vous vous y intéressiez ou le regardiez, libre à vous d’entreprendre cette démarche. Je vous interdis même d’y croire. Je vous demande simplement de comparer Jud Süß à ce que nous pouvons voir aujourd’hui.
Je vous demande de vous interroger parce que le dernier rapport de l’agence intergouvernementale Interpol sur le terrorisme laisse songeur. Dans la seule Europe, en 2009, seuls 0,003% des actes terroristes furent commis par des groupes islamistes. 0,003%, probablement autant que le nombre de juifs qui ressemblaient et ressemblent à Süss Oppenheimer.
Mais attention ! Parce que ce nombre d’attentats islamistes s’envolerait vertigineusement vers les 3%-4% (toujours selon l’agence), si l’on tient compte du monde, dans son ensemble.
A la connaissance de ces chiffres, une question m’est alors venue à l’esprit. Je me demandais pourquoi, depuis 2001, plus de 60% des films américains produits par Hollywood ne cessaient de rabâcher sans relâche le même stéréotype du terroriste moderne. Vous savez, celui avec une longue barbe grisâtre, portant une djellaba, et criant « Allah akbar ! » (Je passerai sous silence l’amalgame que ces films font, en plus, entre musulmans et arabes).
Je ne sais pas si je tiens aujourd’hui ma réponse mais je connais enfin la raison principale qui m’a poussée à regarder Jud Süß.
Probablement, parce qu’il incarne, ce que le cinéma peut être de plus vicieux, de plus manipulateur et de plus avilissant, si l’on sait s’en servir. Parce que le cinéma peut facilement choquer, fasciner, émerveiller, attrister, enchanter, émouvoir. Il peut surtout, tromper, manipuler et endoctriner.
Jud Süß est non seulement un film mensonger sur lequel repose tout un poids de notre histoire mais il surtout un témoignage probant de ce que le cinéma (et ceux qui le dirigent) est capable de faire et perpétue depuis toujours, mentir.

« Toute propagande efficace doit se limiter à des points fort peu nombreux et les faires valoir à coups de formules stéréotypées aussi longtemps qu'il le faudra, pour que le dernier des auditeurs soit à même de saisir l'idée.» Adolphe Hitelr, Mein Kampf (1925)

Diego C.

mercredi 23 mars 2011

Scorsese, une tentation parmi d’autres



Personnage historique ou pas, Jésus a souvent fait jaser. Le cinéma ne l’a d’ailleurs pas épargné. Provoquant indignation ou admiration, la vie de Jésus de Nazareth en a inspiré plus d’un. Pourtant, les écrits concernant sa vie sont peu nombreux et se résument aux évangiles, les autres textes y faisant référence, étant posthumes pour la plupart et souffrant d’une véritable authenticité historique.

Mais la Bible est, à elle-seule, une source d’inspiration débordante. Pas moins de dix films s’en sont ainsi inspirés. Le dernier en date, le controversé La Passion du Christ de Mel Gibson, suscitant critiques et invectives virulentes. Le sujet se prête aux controverses mais Gibson n’en reste pas moins fidèle au livre saint.

Ce n’est pas le cas, en revanche, de La Dernière Tentation du Christ, réalisé par Martin Scorsese. Pour les érudits, voilà le film impie par excellence. Profanation qui fit l’effet d’une bombe au moment de sa sortie en 1988. Trop lointaine pour ceux qui ne l’ont pas vécu mais encore bien ancrée dans les mémoires de ceux qui y ont assisté.


Le film trouve son origine à la fois dans la Bible et dans un ouvrage (au titre éponyme) de l’écrivain grec Níkos Kazantzákis. La particularité du film tient aussi bien de sa mise en scène que de la réflexion qu’il suscite. Car Jésus y est dépeint différemment. Il n’est plus seulement le Christ, fils de Dieu, il est surtout Le Christ, fils de Dieu, conçu à l’image des hommes. Hérésie pourtant pas si éloignée de ce que le livre saint proclame. Parce que « fils de Dieu » signifie aussi « homme dévoué à Dieu » comme de nombreux passages de la Bible le répètent.

Il n’en fallait pas plus pour que le provocant Scorsese use de sa caméra et présente le Christ, semblable au commun des mortels, en proie aux mêmes tentations et aux mêmes désirs. Pas besoin d’aller davantage en profondeur dans le synopsis du film. Tout est suggéré.

Porté par un Willem Dafoe remarquable, dans son rôle d’un Jésus tourmenté et soumis aux doutes, La dernière tentation du Christ sonne le tocsin du cinéma subversif et provocateur. Car, si la portée d’un film se mesure à l’engouement et les déchaînements qu’il peut générer, alors ce ne sont pas les quelques fulminations « antisémites » portées à l’encontre de Mel Gibson qui dissimuleront les multiples condamnations, attentats et prohibitions que La dernière tentation du Christ déclencha lors de sa sortie. Il est d’ailleurs toujours interdit de projection dans plus de dix pays.


Diego C.


lundi 21 mars 2011

Le machiniste du cinéma

     Au premier abord, on aurait pu croire un remake des Temps Modernes de notre regretté Charlot. Un ouvrier en proie aux pires sévices et aux pires labeurs pour obtenir maigre pitance. L’histoire d’un énième travailleur qui troquerait sa liberté contre l’esclavagisme du capitalisme moderne. C’eût été une bonne idée, encore fallait-il bien le réaliser.

     Heureusement, Brad Anderson, le réalisateur de The Machinist ne s’est pas évertué à rééditer une critique de l’aliénation par le travail. Ou du moins, il l’a fait d’une toute autre manière. Une manière bien plus glaciale et sordide qui laisse croire que la critique sous-jacente en sera d’autant plus efficace.

     Trevor Reznik est un ouvrier proche de l’agonie. Il est encore vivant mais sa mine patibulaire, son visage émacié et son corps gracile illustrent suffisamment la condition de décrépitude qui l’avilie. Trevor travaille dans une usine de mécanique. Il travaille sans même se rendre compte de ce qu’il effectue. Son esprit est ailleurs. Il divague pour perdre, peu à peu, tout repère. Sa santé mentale se détériore aussi vite que sa santé alimentaire. Il ne dort plus. Emprunté, il tombe peu à peu dans une folie fatale et irrévocable.


(Christian Bale)

     The Machinist est une descente aux enfers sombre et angoissante, interprété d’une main de maître par un Christian Bale éblouissant. Perdant plus de 25 kilos pour endosser ce rôle difficile, Christian Bale est à la fois méconnaissable et magistral ! Le réalisateur fut même dans l’obligation de mettre un terme au régime drastique qu’il s’infligeait pour que ce rôle ne lui fût pas fatal.

     Le résultat est à la hauteur de la prouesse physique réalisée par l’acteur ! Le spectateur plonge dans une heure et demie d’un univers malsain et suffocant. Une heure et demie d’introspection dans la vie d’un homme, oscillant entre folie et réalité. Une heure et demie grandiose d’un très grand thriller psychologique qui hantera le spectateur, bien plus longtemps encore.
Extrêmement dérangeant et impressionnant!

The Machinist (2003)


Diego C.

samedi 19 mars 2011

Faites l'impasse !


Excusez l’expression. Celle-ci vous paraîtra peut-être trop acerbe mais elle traduit bien ma pensée.

Je m’attendais à découvrir quelque chose de nouveau, de subtil et subversif et je n’ai eu droit qu’à un pamphlet, justifié certes, mais vide, compte tenu du sujet dont il s’agit.
J’aurais voulu connaître davantage ce que pouvait représenter cet art si différent des autres.

J’aurais voulu découvrir davantage celui qui en constitue probablement sa figure de proue, celui qui fit de la rue, un nouveau sujet, un lieu d’exposition.
J’aurais voulu découvrir le Street Art tel que je me le représente depuis que je l’ai découvert. En fait, j’aurais voulu le découvrir davantage encore, au plus profond de son essence.




Mais au lieu de cela, je n’ai eu droit qu’à la dénonciation de quelqu’un qui se targue de le connaître, le copie, le vole et se l’approprie alors qu’il n’est qu’un charlatan. Attitude condamnable, j’en conviens. Mais de là à en faire un reportage d’une heure et demie ! La dénonciation perd de sa crédibilité pour ne devenir que rasoir !


Certes, Banksy présente un aperçu du Street art et de ses origines, histoire de nous mettre l’eau à la bouche. Il s’arrête malheureusement à de vagues poncifs sans entrer dans les profondeurs.
Comme il aurait été bien plus intelligent de s’attarder sur le véritable Street Art pour en dénigrer ce qui le détourne, le corrompt dans un but lucratif. Comme il aurait été plus subtil d’enseigner pour mieux dénoncer ! Parce que la satire n’a d’intérêt que si elle est constructive, alors là, vous m’auriez épaté ! Mais se contenter de dénoncer sans expliquer, vous ne vous contentez que de mépriser. Dommage !

Il m’arrive parfois d’être attiré par un film, simplement par l’évocation de son titre, par son réalisateur ou par le sujet dont il parle. Je n’avais pas lu le sujet tant les premiers critères m’avaient suffisamment captivés. Il m’apparaissait si évident que Banksy parle avant tout de lui, plutôt que d’un autre, surtout quand il s’agit de quelqu’un d’autre, qui, nous serons d’accords, n’en vaut pas la peine. J’aurais voulu recevoir les enseignements du maître, je n’ai eu droit qu’aux tromperies du bouffon !

Diego C.


vendredi 18 mars 2011

Irina, je vous décerne la palme !


Britney Spears, Justin Bieber, Lady Gaga, Cher, Christina Aguilera et autres consorts pullulent et ne cessent de polluer notre bel univers cinématographique de leurs déchets visuels. A croire que cela ne leur suffisait pas de ternir l’univers musical, il fallait en plus qu’ils fassent part de leur nullité sur grand écran. Si tel était l’objectif, ils ont surpassé et même devancé tout ce que l’incompétence n’avait daigné imaginer !

Constat affligeant qui risque pourtant de perdurer. Preuve en est, le dernier (attention, ça promet !), Burlesque, interprétée par Cher et Aguilera. La qualité de la distribution est aussi évocatrice que son titre. Tant mieux, il ne vous suffira que de vous contenter de ces deux aspects pour en tirer des conclusions objectives. Pratique, en somme, pas besoin de voir le film !

Cette ingérence de « musiciens » dans le septième art amène à s’interroger sur la capacité de cumuler les arts comme tant d’autres fonctions. Seuls les contre exemples pourront me faire démentir. Un me vient alors à l’esprit, Marianne Faithfull!



« Belle Marianne, votre visage est au cinéma, ce que votre voix est à la musique, magnifique ! Je ne prendrais à témoin qu’un film mais la déclinaison pourrait s’étendre à l’ensemble de votre filmographie.

En 2007, vous jouiez le rôle d’Irina Palm, votre dernier film en date. Irina Palm, grand-mère courageuse, au visage gracieux et aux mains de fée. Votre petit-fils tombe malade. Une maladie curable, si prise à temps, et extrêmement coûteuse. Votre famille n’est pas en mesure de payer le traitement et travaille d’arrache-pied. Vous êtes à la retraite et vos descendants vous interdisent de travailler à nouveau. Mais vous, Irina, vous êtes déterminée, surtout lorsqu’il s’agit de votre petit-fils. La quête d’un emploi a peut-être un âge limite à ne pas dépasser, l’amour de votre famille n’en a pas. Vous vous mettez à la recherche d’un pécule et cumulez les essais infructueux. Jusqu’au jour où une brèche vous est offerte. Une brèche qui nécessite discrétion car peu recommandable, surtout pour une femme de votre âge. Tant pis ! Vous vous y engouffrez ! Travailler dans un sex-shop d’une rue sinistre de Londres ne vous effraie pas. Pas plus que la tâche qui vous est assignée, devenir masturbatrice professionnelle des âmes patibulaires londoniennes. »

Irina palm est un film saisissant et touchant, teinté d’humour et de tendresse, qui lui aussi porte bien son nom. On lui décernerait toutes les palmes.

Un film où son héroïne, Marianne Faithfull, illumine par sa beauté et son talent. Virtuosité dont elle avait déjà fait preuve cinquante ans plus tôt, avec sa voix, sur les scènes d’un cabaret londonien, à la différence de nombres de ses successeurs.

A croire que quand on est pétri de talent, celui se décline agréablement, dans bien des domaines. C’est aussi vrai lorsque l’on n’en a pas ! N’est-ce pas, Christina ?


Diego C.



Bande-Annonce Burlesque (VOST) par Christina-News


mercredi 16 mars 2011

Beautiful Iñárritu


C’est l’histoire d’une ville qui nous est dépeinte sous ses traits les plus lugubres et les plus sombres. C’est surtout l’histoire d’une ville, Barcelone, que, pour la plupart, vous ne reconnaîtrez que très tardivement, tant l’univers qui y est filmé s’éloigne des stéréotypes et souvenirs que l’on peut en avoir.

C’est encore un chef d’œuvre glacial, émouvant et fataliste comme Iñárritu a l’habitude den réaliser. Un film troublant qui place le spectateur dans un inconfort extrême et un mal-être saisissant. Un film qui trouble par la justesse de l’univers social qu’il retrace.


Un film qui émeut par la justesse du jeu de son héros proche de l’agonie, Javier Bardem, qui confirme l’immense talent qu’on lui octroie. Un film qui n’a encore rien fait au box-office américain et français, comme bien souvent, quand il s’agit d’un chef d’œuvre. C’est d’ailleurs probablement à cela qu’on les reconnaît des autres films.

L’économie n’entachera pas la réputation de son réalisateur qui confirme à chaque film, qu’il n’est pas un réalisateur mexicain parmi d’autres, il en est la figure emblématique et incontestée.

Mais cette fois-ci, Iñárritu va encore plus loin dans la morosité.

C’est l’histoire d’une ville réelle qui, sous les paillettes dont elle regorge, renferme, en son sein, un univers cruel, appauvri et résigné où la survie, car de cela dont il s’agit, n’est plus un avenir sordide sinon un luxe.

Uxbal (Javier Bardem), va bientôt mourir. Un destin inéluctable et irréversible. Sa modeste condition ne lui permet pas de profiter de ses derniers jours comme chacun le souhaiterait. Ce ne sont pourtant pas ses désagréments de santé qui lui astreignent les labeurs qu’il a entrepris, mais la volonté de nourrir ses deux enfants, dignement. Uxbal est un homme simple. Il pourrait être probe et l’homme parfait, à peu de chose près, si seulement il avait vécu dans un monde « Biutiful » comme devrait l’être Barcelone.


Diego C.


Biutiful (2010), d’Alejandro Iñárritu





mardi 15 mars 2011

L'art du documentaire


Certains films prennent tout leur sens artistique dans la dimension politique qu’ils évoquent. Parce que leur revendication amène à la réflexion et au doute. Ces documentaires se servent de l’art cinématographique non plus comme une fin mais comme le moyen le plus mémorable pour leur démonstration.

Se servant de la dialectique pour appuyer leurs dires, de la logique pour les étayer, de l’effroi pour interroger et du cinéma pour dévoiler. Ces documentaires révèlent leur entière qualité dans leur capacité à faire subodorer à leurs spectateurs les drames et enjeux qui régissent les soubassements de notre monde contemporain.

Je n’affirme pas que ces documentaires doivent être tenus pour vrais, au contraire ! Leur échafaudage n’a pour vocation que de réaffirmer le droit inaliénable que constitue le doute d’un point de vue juridique, celui de contester et de ne pas supputer comme acquis, un événement, une situation ou quoique ce soit dans lequel subsiste encore une once d’incertitude.

Ces documentaires se servent de l’art cinématographique pour devenir une arme politique puissante et contestataire. Le plus déconcertant (et même consternant) est qu’aucun de ses films ; dont la portée et les interrogations qu’ils impliquent sont vastes ; alimentent aujourd’hui les débats d’actualité. Comme si chacune de leur démonstration était vouée à l’échec avant même de voir le jour, parce que trop dérangeante !

Mais, il y a une chose que jamais les spectateurs de ces films ne pourront nier : chacune de ces démonstrations sont autant d’exemples patents prouvant que le cinéma (et l’art en général) reste une subversion et une dénonciation plus qu’un divertissement. Et ils le resteront. De cela, je ne doute pas et m’en réjouis.

Diego C.

A ne pas manquer :
- Le cauchemar de Darwin (2004)
- Inside Job (2010)
- Zeitgeist 1,2 et 3 (2007, 2008 et 2011)
- Le monde selon Monsanto (2008)
- La vida Loca (2008)
- Des Français sans histoire (2009)
- The Corporation (2003)
- Attention Danger Travail (2003)
- JFK (1991)


Dans la peau de John Carpenter


« On n’est jamais aussi bien servi que par soi-même » telle pourrait être la devise de beaucoup d’entre nous.
Dans le domaine cinématographique, en revanche, peu pourrait se targuer d’une telle devise. Sauf peut-être une personne. Une personne qui fait aujourd’hui figure d’incontournable et dont le nom ne vous évoquera probablement rien si ce n’est deux qualités, l’intégrité et la discrétion.
Pourtant, il apparaît difficile de passer outre les grandes figures de l’art cinématographique comme cette personne peut l’incarner.
John Carpenter n’est pas du genre à s’en vanter mais s’il y a bien quelqu’un qui perçoit une œuvre cinématographique comme « un tout harmonieux » et indivisible, voilà alors la référence. Bien plus que son talent, c’est peut-être cet insatiable désir, cette volonté farouche d’entreprendre tout et seul qui suscite tant d’intérêt à mes yeux.
Jamais encore, un artiste n’avait été aussi complet que John. Il n’y en aura probablement jamais d’autres. Dommage ! Il faut dire que la tâche n’est pas évidente et si nombre d’acteurs se lancent dans la « simple » réalisation, les déboires qu’ils rencontrent, rendent compte, à eux seuls, de la difficulté d’une telle entreprise.
Alors de là à imaginer, qu’un seul homme puisse être à la fois, pour la majorité de ses films, acteur, réalisateur, auteur, metteur en scène, compositeur, monteur, producteur et scénariste, dans des registres aussi divers que la science-fiction, le fantastique, l’horreur, le drame, le western ou la comédie (et j’en passe) et tout cela, en le faisant bien! Alors là, chapeau !
Parce que John Carpenter s’efforcera toujours de faire du cinéma en y apportant sa touche personnelle dans tous maillons de la chaîne artistique, ses films revêtiront une dimension supplémentaire et un caractère puissant et personnel, qui les rendront éternellement uniques.
Tous ses films auront été marqués d’une empreinte intime qui porte, aujourd’hui, ce virtuose au rang non pas d’artiste sinon d’artisan du cinéma. Un artisan qui façonnera chacun de ses films depuis son projet jusqu’à son éclosion sous les feux des projecteurs, moment qu’il choisira opportun pour s’éclipser, discrétion oblige.
Parce que chacun de ses films, John Carpenter les accompagnera de bout en bout, il n’est plus un artisan du cinéma mais de son cinéma.
Et si tous ses films ne sont pas des chefs d’œuvres, ils auront eu le mérite de faire vivre, un tant soit peu, le cinéma indépendant et libertaire face à l’hégémonie d’Hollywood. Encore une autre de ses nombreuses qualités, l’engagement.

"En France, je suis un auteur, en Allemagne, je suis un faiseur de film, au Royaume-Uni, je suis un réalisateur d'horreur, aux Etats-Unis, je suis un clochard."

Diego C.

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