vendredi 29 juillet 2011

J'aime regarder les filles

A quelques jours de l’élection présidentielle, la France est en pleine effervescence. Plus de 36 millions de français se rueront bientôt vers les urnes. En 1981, Primo a tout juste dix-huit ans. L’occasion de remplir ses devoirs civiques, pour la première fois. Pourtant, Primo se fiche de la politique. Il a d’autres préoccupations. Un Bac, qui approche et qu’il a déjà raté. Une famille, que sa fainéantise exacerbe, et qui ne cesse de lui rappeler le fardeau qu’il constitue. Des petits boulots, qu’il enchaîne à la pelle. Des dettes, à n’en plus finir. Et puis surtout, les filles. Une en particulier, Gabrielle, issue d’un milieu bien plus aisé, dont il tombe brutalement amoureux. Une préoccupation qui va peu à peu évincer toutes les autres.

Sur fond de transformation du paysage politique français du début des années 1980, Frédéric Louf signe une première comédie légère, avec J’aime regarder les filles. Parsemé d’images d’archives des élections de 1981, le film évite de s’enliser dans un militantisme effarouché.
Cette légèreté pourrait même lui être reprochée. Car J’aime regarder les filles manque de cohésion entre l’histoire qu’il retrace et le contexte politique dans lequel il s’inscrit. La ferveur des années 1980 ressort finalement peu. Les décors et costumes d’époque restent très succincts. A se demander si cela valait la peine de situer l’histoire à cette époque, tant l’apport du contexte politique au film, reste finalement énigmatique, ne faisant que souligner, d’un trait léger, le clivage socioculturel qui distingue Primo de Gabrielle.

Mais cette légèreté de ton est volontaire, et prend tout son sens lorsqu’on s’attache au personnage de Primo. J’aime regarder les filles n’est pas une histoire de politique, c’est surtout une amourette de jeunesse, où notre héros tente désespérément de ravir le cœur de Gabrielle.
 Amusant par sa maladresse, touchant par sa timidité et agaçant par son insouciance, Primo illumine l’écran. Pour son premier grand rôle, Pierre Niney (Primo) signe là une performance aussi séduisante que prometteuse. Un jeu d’interprétation qui éclipsera les légères maladresses sentimentales et caricatures que le film véhicule. Drôle et fin, J’aime regarder les filles en charmera plus d’un.

Diego C.

mercredi 27 juillet 2011

Un Amour de Jeunesse

Mia Hanson-Love revient sur les devants de la scène. Après des débuts remarqués dans Tout est pardonné (2007) et Le père de mes enfants (2009), la jeune réalisatrice française repart vers un sujet qu’elle aime, l’Amour. A la différence près que celui-ci concerne la jeunesse, une sorte de retour aux sources.
Camille a 15 ans. Eperdument amoureuse de Sullivan, 19 ans, elle découvre là son premier amour. Jusqu’à ce que Sullivan désire voler de ses propres ailes, en Amérique du Sud. Dès lors, Camille semble perdue, au bord du suicide. Il lui faudra plusieurs années avant de s’en remettre et de retrouver goût à la vie. Poursuivant ses études d’architecture, elle renoue avec la joie de vivre qui l’avait quittée, et tombe amoureuse, à nouveau. Un amour peut-être moins intense, jusqu’à ce qu’elle recroise Sullivan, huit ans plus tard.
Pour ce troisième long-métrage, Mia s’est dotée des mêmes ingrédients qui l’avaient projetée sous les feux de la rampe. Des acteurs méconnus, des plans soignés et lumineux et une musique entrainante. On y découvre dès les premières minutes du film une étoile montante du cinéma français, Lola Creton, prochainement à l’affiche d’En Ville, fin juillet.

Si Mia s’est dotée des mêmes ingrédients, on est pourtant bien loin du même résultat. Un Amour de Jeunesse manque d’allant et pâtit cruellement d’un jeu d’interprétation à la limite du désagréable. La faute en grande partie à Sebastian Urzendowsky, l’autre protagoniste du film. Sa voix fluette et sa douce naïveté agacent autant qu’elles ternissent les premières minutes. On parierait sur une grossière erreur de casting, si le film s’arrêtait là.
Car c’est l’histoire d’amour elle-même qui flanche. Légèrement mièvre, le film tombe peu à peu dans un dramatisme qui se veut léger mais qui perd toute authenticité. On suit inlassablement le parcours de cette jeune femme, en construction, mais qui peine à sortir de cette candeur puérile. Evitant de rentrer dans la psychologie des personnages, le film perd sa teneur intimiste et personnelle. On reste dans un amour suranné, inaccessible et creux. A aucun moment, le spectateur se sent véritablement submergé par ces sentiments naïfs.
Le défaut d’Un Amour de Jeunesse résulte aussi de l’écoulement du temps, qui ne laisse aucune marque. Aussi bien physiquement que sentimentalement, les personnages ne murissent pas, le spectateur non plus. Les dialogues sont d’ailleurs édifiants de cette carence. Se voulant littéraire, la prose illustre avant tout un dialogue de sourd, un « je t’aime moi non plus » qui se dépouille de tout sentiment véridique. On est très loin des qualités dont était doté Le Père de Mes enfants.
Le film prend néanmoins de la hauteur et mérite d’être apprécié. Les apparitions, tardives ou trop succinctes, de Magne Havard Brekke, déjà dans Le Père de mes enfants, et de Valérie Bonneton,  apportent enfin un semblant de maturité. Certains plans remarquables valent également d’être soulignés, le dernier en particulier, superbe. Tout comme la mise en scène, à travers laquelle on reconnait le talent indéniable de cette réalisatrice, qui avait tant enchanté. C’est malheureusement trop peu pour Un Amour de Jeunesse qui laissera probablement un sentiment d’incompréhension. Il s’agit peut-être pour Mia d’une autobiographie filigranée, d’Un Amour à oublier, d’une copie à revoir, aussi.  
Diego C.

lundi 25 juillet 2011

Harry Potter et les reliques de la mort Partie 2

            Si je n’étais pas tout à fait d’accord avec Harry, un ami qui vous veut du bien, le moins que l’on puisse dire est que ce dernier opus n’aide pas à relever le niveau. Si tous les fans seront dithyrambiques, je vais les décevoir. Dix ans d’attente pour ça !

            Je commencerai par le choix du réalisateur, David Yates. Il est Le réalisateur depuis l’Ordre du Phoenix, le cinquième tome, lui qui n’avait jamais réalisé un film avant. Si Harry Potter a gagné en maturité, ce n’est pas le cas de son réalisateur. Il n’a jamais réussi à rendre l’ambiance des livres. Fade, mou, sans ambitions ni saveurs, ses adaptations n’ont été que déceptions sur déceptions. Seul Alfonso Cuaron (Le prisonnier d’Azkaban) et Mike Newell (La Coupe de Feu) ont réussi à éviter l’écueil du film pour ados.

            La satisfaction de la saga terminée, seules certaines scènes flamboyantes me laissent rêveur. Le reste n’est que lenteur, longueur et sensationnalisme. La personnalité des héros de la saga ont carrément disparu. De quoi peut-être satisfaire les fans, de quoi rebuter les cinéphiles. 


            Alors que les vingt premières minutes avaient commencé sur les chapeaux de roues, avec des effets visuels impressionnants, le reste du film perd peu à peu de son intérêt. Yates se permet même de squeezer une partie de l’histoire. Direction donc Poudlard et l’attaque de l’école. Si celle-ci, trop courte, est tout de même digne du Seigneur des anneaux, grâce à ces plans larges, les combats entre sorciers et le combat final tant attendu entre Voldemort et Harry manquent terriblement d’intensité et tombent dans le ridicule.

            Ou est donc passé l’ambiance torturée, désenchantée et sombre des livres de J.K Rowling ? Qu’est devenu l’émotion permise par les couples d’Hermione/Ron et Ginnie/Harry ? La scène finale est digne de ce que sait bien faire son réalisateur, des films de série B pour la télévision anglaise. La 3D ne sert même pas à couvrir les manques de la réalisation et du scénario. 250 millions de dollars de budget qui aurait du être donné à un autre réalisateur, car Yates a réussi ce que personne ne pouvait imaginer, rendre Harry Potter ennuyeux, digne d’un film pour enfants.



Vincent L.


lundi 18 juillet 2011

Le Moine

Après les très bons Harry un ami qui vous veut du bien (2000) et Lemming (2005), Dominik Moll faisait son retour derrière la caméra, après six ans d’absence, avec Le Moine.
S’inspirant d’un roman au titre éponyme de Matthew Lewis, Le Moine retrace le parcours du capucin Ambrosio.

Fervent prosélyte, ayant toujours vécu dans la Foi et dans la dévotion au Seigneur, Ambrosio vit dans un monastère en Catalogne. Adulé par beaucoup de croyants, il fait l’unanimité et rassemble chaque jour des fidèles de plus en plus nombreux. Pieux et vertueux, il va néanmoins, peu à peu, sombrer dans le péché, succombant aux tentations d’une femme, amoureuse de lui.

Ce n’est pas la première fois que Matthew Lewis est adapté sur grand écran. Déjà, le Grand Buñuel s’était attelé à le scénariser en 1972 pour Adonis Kyrou. La besogne n’était donc pas mince pour Dominik qui touchait ici à un registre nouveau pour lui, le film d’aventure historique, gothique en particulier.
            Et on est agréablement entraîné par le début. Les paysages moyenâgeux et les costumes hissent le film et amplifient son côté mystique. Accompagné d’une musique assez glaçante et d’un bon Vincent Cassel, Le Moine suscite l’angoisse en tirant partie de tous les codes du style fantastique. Corbeau, rêve, Diable, apparitions fantomatiques sont autant de concepts qui s’immiscent peu à peu  et alimentent son ambiance gothique. L’obscurité ambiante qui habite ce monastère plonge le spectateur en haleine. Les dialogues sont bons quoique peut-être trop policés, mais l’époque et l’ordre ecclésiastique s’y prêtent. On s’y fait rapidement et on s’attend, dès lors, au film subjectif par excellence dans le sujet qu’il aborde, angoissant par le genre auquel il se prête, haletant par le suspense qu’il fait naître. Cela rappelle grandement un autre chef d’œuvre du genre, Le Nom de La Rose (1986) de Jean-Jacques Annaud.

            Malheureusement ceci ne concerne que le début, car à mesure que le film se poursuit, l’intrigue s’enlise, si tant est qu’elle eût véritablement existé. On tente vainement d’invoquer le mystique pour nourrir un suspense qui n’a finalement jamais eu lieu. Ambrosio perd pied et sombre, peu à peu, dans les abysses du péché, mais le spectateur ne sent plus véritablement concerné. La mise en scène reste bancale avec des plans en iris d’un mauvais goût et qui manquent de finesse.
 Le film pâtit cruellement d'une absence de cohésion et de rebondissements. Les ravissantes Joséphine Japy (tout juste auréolée de son bac de Français) et Déborah François, qui incarnent et nourrissent ce désir de chair que ressent Ambrosio, ne parviennent pas à être des éléments suffisamment perturbateurs pour sustenter le suspense. On tombe dans un thriller nauséeux.
La fin du film est d’ailleurs évocatrice de cette carence, tant elle est semblable à celle d’Incendie (2010), de Denis Villeneuve. Une comparaison nécessaire car édifiante. Alors qu'Incendies ravit, Le Moine ennuie.
Diego C.

dimanche 17 juillet 2011

I'm Still Here!

            Tout ceci n’était donc qu’un canular, un canular rudement mené par la caméra de Casey Affleck, et la performance remarquable d’un Joaquin Phoenix, plus que jamais métamorphosé.  Une métamorphose de physique et de style pour un registre qu’il connait peu, la comédie.  Une comédie qui aura tout de même nécessité près de deux ans de tournage, pour un résultat plus que réussi.
Deux ans de spéculations sur la prétendue retraite prise par Joaquin Phoenix en tant qu’acteur, pour une carrière de rappeur.

I’m Still Here  filme sa vie, celle d’un acteur au sommet de sa gloire, depuis qu’il a décidé de mettre un terme à sa carrière d’acteur pour emprunter  la voie du hip-hop. Mais, la voie a plutôt allure de sentier sinueux pour Joaquin. N’est pas rappeur qui veut.

I’m Still Here est un documentaire dont on sait trop vite qu’il est un canular. Le film avait suffisamment généré de spéculations en amont et les protagonistes s’étaient d’eux –mêmes dénoncés. Élaboré minutieusement par Casey Affleck, I’m Still Here  évincera  le doute dans l’esprit du spectateur quant à la réalité des faits. Il s’agit bien d’une fiction. Joaquin n’a pas l’intention de rapper, du moins pas trop souvent, tant mieux.  Ce film est une fiction car trop minutieux, trop bien ficelé, trop long et par moment trop exagéré par cet esprit un peu « Jackass » qui ternissent la vraisemblance du «  Documentaire de terrain ».

Pourtant, le film dégage cet aspect authentique et réel par cette justesse des plans filmés, centrés sur les visages des personnages. Agrémenté d’images d’archives de certaines déclarations de Joaquin sur des grandes chaines de télévision américaine, alors qu’il jouait son personnage,  le film parvient à nourrir une certaine crédibilité quant à ce changement de métier.

Mais, le film puise surtout sa force dans la réflexion qu’il nourrit. Difficile de se prononcer quant à son objectif. Est-il une critique dissimulée des médias ? L’épilogue d’un acteur adulé et le début d’une déchéance, d’une descente aux enfers ? Ou plus simplement  un aperçu du show business ? Probablement les trois à la fois ce qui nourrit son intérêt.

Et puis il y a les acteurs. Enrichi par de nombreuses  mais courtes apparitions de stars, le film offre une vision amusante et caricaturale du monde des célébrités. Ben Stiller, que  l’on connaît comique sur les planches, apparaît sérieux et ennuyeux.  P.Diddy à l’inverse, connu pour ses frasques plus violentes, est drôle, doux et joue juste. Mais c’est surtout Joaquin Phoenix qui éblouit. Loin de l’élégance qui l’avait caractérisée dans Two Lovers (2008), loin de la sobriété de La Nuit Nous appartient (2006), Joaquin se présente ici sous ses traits les plus méconnus parce que les plus grossiers. Ventre opulent, visage émacié, mine patibulaire, regard abattu, barbe broussailleuse, cheveux hirsutes et esprit tourmenté sont autant d’attributs de ce personnage qui voltige entre cocaïne et cannabis, prostituées et hôtels de luxe, rap et oisiveté. Aussi méconnaissable qu’hilarant, Joaquin Phoenix manie à la perfection autodérision et sincérité, confirmant ainsi, aux plus sceptiques d’entre nous, qu’il est avant tout un acteur, remarquable d’ailleurs.
Diego C.

mardi 12 juillet 2011

Hanna

            Après Pride & Prejudice (2005), Atonement (2007) et The Soloist (2009), Joe Wright présentait son tout nouveau film, Hanna, sorti le 6 juillet dernier.


           L’histoire d’une jeune adolescente de 16 ans, vivant recluse avec son père, Erik Heller, ancien agent de la CIA, aux fins fonds de la Finlande. Formée depuis son plus jeune âge par son père, Hanna a tout appris dans les encyclopédies ou les livres. Mais Hanna est aussi une combattante hors paire, parlant couramment cinq langues. Enfin mûre pour sa première mission, Hanna quitte son père qu’elle doit retrouver à Berlin. Pour la première fois dans sa jeune existence, Hanna va être livrée à elle-même. Elle y découvrira un monde extérieur rude et bien d’autres obstacles qui ne feront que, remettre en doute sa véritable identité, et solliciter ses techniques de combat, son art de la survie.


            Joe Wright se lançait ici un nouveau défi, le film d’action, une première pour lui, généralement habitué au mélodrame. Et une chose est sûre, il s’y prend déjà mieux.

            Accompagné d’une musique nerveuse, exclusivement composée par The Chemical Brothers, le début du film captive son audience et présente toutes les qualités du thriller réussi. Un lieu inconnu, désert, une actrice aussi jeune que talentueuse, Saoirse Ronan, qui n’en finit plus de surprendre et signe là un rôle sobre, d’une maturité déconcertante pour 17 ans, et une intrigue désarçonnante parce qu’énigmatique. De quoi s’attendre à un suspense et un dénouement tonitruant. Bref, Joe Wright était en passe de signer un Action movie digne de La Bourne Trilogy.

C’est malheureusement là qu’Hanna déçoit. Le film ne s’envole pas et l’intrigue reste finalement plate voire confuse. Cela manque sincèrement de fond. Les scènes de combat sont trop peu nombreuses pour un film de ce genre. Un dénouement qui clôt un scénario intriguant au départ, bâclé à l’arrivée. On reste sur sa faim, et sur cette fin plus que précipitée. Hanna laisse dès lors un goût d’inachevé.

Diego C.

lundi 11 juillet 2011

L'Assaut

L’année dernière, Julien Leclercq revenait sur nos écrans avec son troisième film, L’Assaut (2010). L’Assaut revient sur la dernière mission médiatique et héroïque menée par les membres du GIGN, entre le 24 et 26 décembre 1994, sur le bitume de l’aéroport de Marignane, à Marseille, alors que quatre terroristes du Groupe Islamique Armé (GIA) avaient pris les 220 passagers du vol Air France 8969, un Airbus A300, en otage. L’avion, en provenance d’Alger, avait pour destination Paris et fut contraint de faire escale à Marseille pour faire le plein de kérosène. Moment choisi par le GIGN pour intervenir.

Le film de Julien Leclercq jongle assez subtilement entre quatre histoires qui se complètent et se superposent. Le réalisateur plonge à la fois son spectateur au sein des forces d’élites françaises, des terroristes présents dans l’avion, des chefs d’état français et de la famille d’un membre du GIGN, incarné par Vincent Elbaz.
Alimenté par certaines images d’archive (rappelons que le véritable assaut fut diffusé en direct sur les chaînes de télévision française), le film présente ainsi toutes les facettes des parties impliquées dans ce qui restera, l’une des interventions militaires des plus ardues et des plus réussies du 20ème siècle. Julien Leclercq alterne agréablement entre documentaire et film d’action et résume ainsi parfaitement les rouages de toute cette affaire, aussi bien au sommet des institutions étatiques que sur le terrain.

Et le terrain est d’ailleurs l’une des réussites du film. Parce Julien Leclercq s’est grandement inspiré des véritables membres ayant composé cette intervention, et qu’il a tourné le film en totale collaboration avec le groupe d’intervention, les scènes d’actions deviennent réelles, d’une intensité haletante. Les terroristes n’échappent d’ailleurs pas à la règle, par leur jeu d’interprétation juste et jusqu’ « au-boutiste ». Les scènes d’action sont détonantes, énergiques et évitent tous les écueils du genre. Pas de bombes inutiles ou d’explosions grossières. L’action est précise, filmée de plans succincts et peu nombreux qui lui donnent cette dynamique nerveuse. Une justesse des plans à l’image de l’opération qu’elle décrit, précise et minutieuse, sans fioriture. L’assaut, à proprement parler, ravit et vaut certaines scènes d’action à l’américaine.

Mais voilà, en voulant trop s’inspirer des films américains, il a fallu, pour une raison obscure, y intégrer une quatrième histoire, dont Hollywood est généralement friand. Une quatrième histoire que l’on suit épisodiquement, en trame de fond. Vincent Elbaz est, certes, un homme dévoué à son métier, mais il est aussi un mari, dévoué à sa femme et son nouveau né. Le film plonge alors dans une histoire intimiste qui fait davantage office de préjudice. Une histoire insipide qui ternit énormément toutes les richesses dont il regorge. On tombe dans un pathos mièvre et inutile, qui donne, en plus, un air de déjà vu, dont le GIGN se serait allègrement passé. Le spectateur aussi. Dommage.

Diego C.

jeudi 7 juillet 2011

Pater : Entre Fiction & Réalité

Difficile d’être mesuré quand il s’agit du dernier film d’Alain Cavalier. A en voir certaines mines interloquées, déconfites à la sortie du ciné, ou d’autres exaltées, il devient dès lors difficile de se prononcer, objectivement.

Les sentiments sont plus que partagés. Il faut reconnaître que rares sont les films suscitant des avis si mitigés. Car Pater est un film sans en être un. Il est une fiction, empreinte de réalité, ou peut-être l’inverse, une réalité teintée de fiction. Oscillant entre film et documentaire, fiction et réalité, autodérision et sincérité, Pater s’inscrit dans la ligne directe de films comme le Bal des actrices (2007) ou La vie au ranch (2009), pour ne citer qu’eux. Il est un ensemble de saynètes de la vie quotidienne, un mentir-vrai à la Aragon. Difficile dès lors d’y établir un synopsis. Pater est-il une fiction entre un président et son premier ministre, ou un délire entre deux amis, entre un réalisateur et un acteur ? Probablement tout cela à la fois, si bien qu’il n’est finalement ni l’un, ni l’autre.

Cavalier, président de la République française nomme son nouveau premier ministre, Vincent Lindon, chef d’entreprise qui a fait de la lutte contre les inégalités sa priorité. Il dirige son entreprise brillamment. C’est ce qui plaît à Alain qui le nomme, le forme et le prend sous son aile, tel un père avec son fils, un maître avec son disciple, un réalisateur avec son acteur, pour qu’il prenne, peut-être un jour, sa place, qui sait.

De là naît la complexité du film d’Alain Cavalier. Car Pater est un film dans le film, Vincent est à la fois Vincent Lindon, acteur connu et reconnu, engagé aussi, et Vincent, chef d’entreprise d’une cinquantaine d’années qui choie ses employés comme personne. Il est parfois difficile de cerner quel rôle joue Vincent. Est-il l’acteur ? Ou le chef d’entreprise ? Il oscille entre l’un et l’autre mais le spectateur ne s’y perd pas. Quoique, parfois, il lui est difficile de faire la part entre les deux. Car l’entrepreneur et l’acteur se ressemblent comme deux gouttes d'eau. La frontière entre l'entrepreneur, futur ministre et l'acteur est friable, surtout dans leur engagement politique. Lindon a su se faire entendre par le passé et n’hésite pas à l’arborer, ne serait-ce que dans le choix de ses films, La Belle Verte (1996), Ma petite entreprise (1999) et Welcome (2009) en première ligne. Il est comme ça Vincent, engagé. Alors pourquoi serait-il différent dans Pater, pourquoi ne pas être lui-même ? C’est aussi comme ça qu’on l’aime.

Et puis il y a Alain, le réalisateur, le Président de la République. Pour le coup, Alain semble être davantage Président que réalisateur, davantage un acteur. Probablement encore plus éblouissant que Vincent. Alain, ce président profond, sincère, drôle, à la voix suave, au ton solennel, au visage espiègle, jetant de subtiles regards, goguenards et complices, à sa caméra. Une finesse de jeu rare.

Et puis il y a le plus troublant, les dialogues. Vraisemblablement peu travaillés, peu approfondis, drôles, indigestes, crus, littéraires, futiles ou inutiles mais qui leur donnent cette teneur tellement naturelle, proche de l’authentique. On croirait à de la prétendue improvisation, alors que tout est finement écrit, réfléchi.

 Une sincérité filmée par des plans énigmatiques et des angles peu nombreux, mais si intimes.

Certes, le film s’essouffle peu à peu et se noie dans certaines longueurs. Mais que l’on puisse avoir la critique amère ou dithyrambique n’a finalement que peu d’importance dans le cas de Pater. Il est décevant peut-être, enthousiasmant surtout, mais assurément tellement différent. D'un nouveau genre, finalement.
Diego C.

A propos de Pater d'Alain Cavalier, avec Vincent Lindon et Alain Cavalier, sélection officielle du Festival de Cannes 2011

mercredi 6 juillet 2011

L'Erotisme au sommet de son Art

« Ce n’est pas le tabou qui me fascine, mais l’érotisme », déclarait un jour le réalisateur japonais Nagisa Oshima.

Et de l’érotisme, il en est entièrement question dans l’Empire des Sens (1976), qui fit davantage l’effet d’un tabou pendant près de 25 ans dans son propre pays et dans bien d’autres encore. Il est d’ailleurs toujours interdit dans de nombreux pays.

La raison à cela, le caractère pornographique que pourraient revêtir les scènes du film, où toutes les scènes de sexe (et elles sont nombreuses) sont jouées réellement par les acteurs, influant à cette œuvre une authenticité rare.

Forçant l’indignation pour certains, l’admiration pour d’autres, L’Empire des sens n’en reste pas moins un monument du septième art. Parce que faisant de chaque scène de sexe, une déclaration d’amour, une échappatoire à la réalité brutale, l’Empire des sens est surtout une représentation esthétique et diégétique de l’amour charnel, dévorant, avilissant, destructeur.

Inspiré d’un fait réel japonais, le film met en scène, une ancienne prostituée, Sada Abe, repentie, et devenue servante d’une auberge de Tokyo, dans les années 1936. Sada est tout de suite remarquée par le maître de maison,  Kichizo. Empli d’un désir sexuel envers la jeune femme, Kichizo va décider d’en faire sa maîtresse afin d’assouvir ses pulsions. Un jeu charnel qui va s’envenimer, pour ne devenir qu’une passion embrasée et ravageuse, entrainant implacablement les deux amants vers une destruction inévitable, où la mort ne fera figure que d’issue, salvatrice. Il s’agit là du crime passionnel comme il n’a jamais été filmé, où le sexe n’est ici qu’un artifice pour mettre en exergue le va-et-et vient perpétuel qu’il existe entre le plaisir et la mort.

            A travers l’Empire des sens, Nagisa Oshima offre plus qu’un film, il offre une réflexion poussée sur la passion comme destruction de l’être humain, sur les fantasmes comme une poursuite insatiable, comme un carcan dont il est difficile de s’extirper. Une réflexion sur les sens comme un empire, un empire auquel l’homme se soumet inévitablement. Un empire asservissant et dangereux.

            L’Empire des sens est subversif, provocateur, pur, esthétique, sublime surtout, et restera, à jamais, une œuvre majeure du cinéma.

Diego C.


dimanche 3 juillet 2011

Omar m'a bluffer

                Pour son deuxième film derrière la caméra, le talentueux Roschdy Zem s’attaquait à un sujet aussi délicat que médiatique, l’Affaire retentissante d’Omar Raddad. S’inspirant intégralement du fait divers qui secoua l’univers juridique  et médiatique du début des années 90, Omar m’a tuer ravive les prises de positions en faveur d’Omar, inculpé du meurtre de son employée, Madame Ghislaine Marchal, et condamné à 18 ans de réclusion en 1991, puis gracié, 7 ans plus tard. Au-delà de toutes considérations quant à la thèse avérée du film, qui clame l’innocence d’Omar Raddad, on alterne bon et moins bon.
                Encore que le moins bon reste limité. L’écueil était pourtant de taille, faire du personnage d’Omar Raddad, la figure de proue de l’innocence brimée par une justice sans cœur, défendant, corps et âmes, les riches au détriment des pauvres maghrébins opprimés ; faire de l’affaire d’Omar Raddad, un procès raciste alors qu’il reste, avant tout et surtout, un procès, on ne peut plus bâclé. La première image du film, une image d’archive, montrant l’avocat d’Omar, à l’époque, Maitre Vergès, à la sortie du verdict de 1991, laissait supposer le pire :
« Il y a cent ans, on condamnait un officier car il avait le tort d'être juif, aujourd'hui on condamne un jardinier car il a le tort d'être maghrébin. »
                Une citation comme aime les marteler le maître de la théâtralisation, le défenseur invétéré et inconditionnel des causes perdues, tant qu’elles demeurent super-médiatiques. On s’imaginait le décor planté, Dreyfus 2 le remake, 110 ans plus tard. On est agréablement surpris. Roschdy Zem s’extirpe de ce paradigme et écarte toute accusation raciste pour ne s’attarder que sur les aberrations du procès, nombreuses, et la personnalité d’Omar, candide et introvertie. Et c’est justement là que le film pêche.

                En soi l’idée était bonne. Jongler entre deux histoires indépendantes et étroitement reliées. L’une suivant l’écrivain Jean-Marie Rouart (alias Pierre-Emmanuel Vaugrenard dans le film, interprété par Denis Podalydès) qui poursuit inlassablement la quête de la vérité et fait ressurgir toutes les zones d’ombres du procès, les zones non-explorées et néanmoins tellement cruciales. L’autre se préoccupant du personnage d’Omar Raddad (interprété par Sami Bouajila), de sa personnalité, et de son état psychologique au fur et à mesure du procès et de ses années passées en prison.
 Le problème est qu’Omar m’a tuer ne parvient pas à jongler correctement entre les deux. Ou plutôt privilégie l’un au détriment de l’autre, alors que les deux sont étroitement corrélés. Le film n’approfondit pas suffisamment les incohérences juridiques du procès, il ne fait que les suggérer, les mentionner, en coup de vent, par moment. Elles sont pourtant la clé de toute cette affaire, l’origine de cette effervescence médiatique.  Les scènes du procès, qui se tint à l’époque, manquent véritablement, et les brèves dites scènes, pâtissent cruellement de tonique, de fond surtout. Les pièces à conviction détruites, les procédures bâclées de l’enquête sont abordées sans être étayées. On  entre alors dans le moins bon du film qui dénonce l’erreur judiciaire, sans la mettre suffisamment en exergue, comme s’il ne faisait aucun doute qu’Omar était innocent, depuis le début.
Mais le film s’élève à travers le personnage d’Omar, magistralement interprété par Sami Bouajila. Un rôle de composition qu’il exerce à merveille, dans les moindres détails. Un rôle quasi-mutique, parsemé de français vacillant. Un personnage qui suscite l’émotion, touchant par l’impuissance qui l’enveloppe, un personnage démuni face à un procès dont il peine encore à comprendre les chefs d’accusation qui lui sont reprochés. Un personnage meurtri, détruit par sept années de prison, mais persévérant, clamant, à cor et à cri, encore et toujours, son innocence. Un rôle dont le film puise sa force durant toute l’histoire. Là, vient alors le très très bon.
Omar m’a tuer réhabilite la réalité et la nourrit encore davantage. Car si Omar Raddad est aujourd’hui en liberté, il se bat toujours pour que la justice reconnaisse sa non-culpabilité. Un combat qu’il mène depuis 20 ans maintenant, et dont on peine encore à percevoir le générique de fin. Une affaire qui n’a pas fini de faire jaser. Roschdy Zem, lui, prend de l’ampleur en tant que réalisateur, pour un deuxième film pas facile. Quant à Sami Bouajila, ne pas le nominer dans une catégorie prestigieuse à la prochaine cérémonie des césars serait, pour le coup, lui faire très mauvais procès, à n’en pas douter.
Diego C.


samedi 2 juillet 2011

Adieu Peter!

Petit hommage… au petit écran. Nous donnons aussi la parole à la télévision qui, en ses heures de gloire, a aussi contribuée et alimentée nos heures de détente. Loin des Star Academy, et autres Nouvelle Star, il fut un temps où notre petit écran diffusait encore des choses correctes. Mais cela ne risque pas de s’arranger avec la disparition de notre détective préféré. Le borgne perspicace tant redouté des malfrats et meurtriers.
Oui notre inspecteur méticuleux, à qui aucun micro-détail n’échappait, ne vêtira plus jamais son vieil imperméable beige inclassable. Notre enquêteur implacable ne déambulera plus dans sa mythique Peugeot 403 cabriolet, à l’odeur de cigare bon marché. Peter Falk nous a quittés  il y a une semaine, de quoi susciter un dernier papier,  de quoi lui rendre un dernier hommage.
Il restera comme l’une des références en matière de télévision, incarnant l’infatigable, quoique désabusé, lieutenant Columbo, pendant 35 ans, délaissant peu à peu tout autre rôle. A lui seul, il incarna l’une des séries le plus mythiques du petit écran. Une série intergénérationnelle qui reste encore aujourd’hui, l’une des plus rediffusées à travers le monde.  Elle le restera probablement encore longtemps, Peter Falk vivant ou pas.  

Diego C.