dimanche 22 mai 2011

Festival de Cannes, what else ?


Actualité & Festival de Cannes obligent, nous vous proposons ce mois-ci de parcourir avec nous les grands opus qui furent couronnés par cette académie prestigieuse. Voilà maintenant 65 ans que le grand jury décerne chaque année sa palme, autant d’années qui furent marquées par des surprises, des confirmations. Autant de récompenses qui ont nourri aussi bien les critiques que l’univers cinématographique et son environnement.

Nous poursuivons donc ce tour d’horizon par l’incontournable mais méconnu Barton Fink des frères Coen, sorti en 1991 et auréolé de trois prix, dont le plus prestigieux et le plus convoité de tous, la palme d’or. L’histoire d’un écrivain qui tombe dans les abysses de la panne d’inspiration, l’histoire d’un écrivain en proie à des angoisses inhibitrices et des voisins déjantés. Le film est brillant, interprétés par un John Turturro poignant et un John Goodman hilarant, fidèles à eux-mêmes, lorsqu’ils sont dirigés par la fraternité Coen. Le film fit l’unanimité auprès de tous et ravit à bon nombre de prétendants toutes les récompenses. Palme d’or, Prix d’interprétation masculine, Prix de la mise en scène. Pourtant, les concurrents avaient leur mot à dire. On pense à Maurice Piallat et son Van Gogh ou Europa de notre sulfureux Lars Von trier, un « Ex»-habitué de la côte d’Azur. Tous avaient de bons arguments mais le choix du jury fut sans appel, peut-être parce qu’en y regardant de plus près, il n’avait pas lieu d’en avoir…

(John Turturro dans Barton Fink)

Néanmoins, le choix de Barton Fink n’est pas anodin dans notre revue de la croisette. Barton Fink est un film excellent qui incarne à lui seul les difficultés sous-jacentes au monde féerique du tapis rouge et de ses paillettes. Parce que Barton Fink fut le premier et le dernier film à avoir ravi autant de récompenses sur la Côte d’Azur et cela pour deux raisons.

La première tient au président du jury de l’époque, Roman Polanski. Un homme au-dessus des lois qui n’hésita d’ailleurs pas à jouer de son aura et de son statut de président pour obliger tous les membres à voter pour Barton Fink. La malhonnêteté de monsieur Polanski fut édifiante. Invitant tous les membres du jury dans un restaurant cannois, les priant de se désaltérer jusqu’à satiété, Polanski improvisa un vote, alors que tous les membres étaient éméchés, qui vit Barton Fink récompensait trois fois. Tous les membres demandèrent à ce que le vote soit refait de manière convenable mais leur président refusa catégoriquement.

(Roman Polanski, Président du Festival de Cannes en 1991)
La deuxième raison relève davantage de l’économie. Car si le Festival de Cannes est une reconnaissance artistique glorieuse, il est aussi au cinéma, comme tout prix d’une telle aura, ce que le prix Goncourt est à la littérature, une manne financière indéniable et parfois pharamineuse. En soi, cela ne peut être avancé comme une critique. Une œuvre, parce qu’elle est réussie, doit pouvoir jouir de ce succès dans les salles. D’une certaine façon, c’est aussi une consécration. Pourtant, suite aux trois récompenses décernées par le jury et à la fraude du président qui l’incarnait, certaines voies s’élevèrent à juste titre, mais assurément pas pour les justes raisons.

Depuis, la commission du festival a décidé, à l’unanimité de tous ses membres et des producteurs surtout, qu’un film ne pourrait être récompensé plus d’une fois.

La raison invoquée par la commission à cette décision s’enracine dans la devise du festival, promouvoir les films. Une initiative qui aurait été respectable si elle n’avait pas été teintée d’hypocrisie.  Pourquoi ? Parce que Festival de Cannes rime avec argent. Conclusion, si un film remporte tous les honneurs, qu’auront les autres à se mettre sous la dent ? Rien.

Alors la question du jour, pour vous chers lecteurs :

Comment appelle-t-on une compétition où, chaque année, près de 20 films font partie de la sélection officielle et où, au minimum, un film sur deux sera récompensé, que le jury soit corrompu ou pas ?



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