jeudi 26 mai 2011

Un film roi

L’homme qui voulait vivre sa vie (2009), L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux(1998), L’homme qui plantait des arbres (1988), L’homme qui aimait les femmes (1977) sont autant d’hommes qui ont alimenté notre univers cinématographique.

Mais s’il y a bien un homme dont il faudrait parler ou plutôt un film qui fit de deux hommes des rois du cinéma, alors attardons-nous sur L’Homme qui voulut être roi de John Huston.
Réalisé en 1975, le film s’inspire directement d’une nouvelle au titre éponyme de l’anglais Rudyard Kipling. Son adaptation au cinéma demandera au réalisateur John Huston, fidèle admirateur de l’écrivain, près de 20 ans de réflexion et plus de 6 mois de tournage pour un budget de près de 8 millions de dollars, dont de nombreux bakchichs, concédés à toutes les autorités locales pour filmer leur paysage.

L’Homme qui voulut être roi est l’aventure de deux anglo-saxons, Peachy Carnahan (interprété par Michael Caine) et Daniel Dravot (Sean Connery) qui, à la fin du19ème siècle, assoiffés de pouvoir, décident de partir là où personne n’a osé s’aventurer depuis Alexandre Le Grand, le Kafiristan. Ne vous préoccupez pas de savoir où cela pourrait se situer. Seul l’imaginaire du démentiel Kippling pourrait y répondre. Nos deux téméraires quittent donc l’Inde et son Commonwealth pour explorer de nouveaux horizons.

Le film dure plus de deux heures. Deux heures où le spectateur sera plongé dans un road movie époustouflant. Pas de voiture mais des dromadaires. Pas de moto mais des chevaux. Tourné aux Etats-Unis, au Maroc, en Inde, en France et en Afghanistan, la qualité du film repose avant tout dans les paysages qu’il révèle au spectateur. Un voyage à la Lawrence d’Arabie. Un périple semé d’embuches où l’étendue des contrées filmées fustige son audience autant qu’il l’émerveille. Apparaît dès lors toute la dimension esthétique du film.


Et puis, il y a l’histoire du film, son contenu. John Huston ne voulait pas se dérober à la nouvelle originelle. Il s’y colle à quelques détails près. De l’histoire, jaillit la dimension politique du film, fidèle à son écrivain engagé. Kippling est un anglais, un amoureux de l’Angleterre et de l’Inde, mais surtout un fervent défenseur pour l’indépendance des pays du Commonwealth. Daniel Dravot et Peachy Carnahan ne sont pas seulement deux aventuriers, ils sont un pays, l’Angleterre. Ils incarnent une critique, l’impérialisme occidental ou la domination par la force et la suffisance. La critique n’est pas explicite, elle n’est que suggérée, tacite. Et c’est ce qui la renforce. Tout spectateur averti y verra une contestation du régime de l’époque et l’ingérence outrageuse et méprisante du colonialisme, anglais spécifiquement, occidental surtout.

Enfin il y a deux acteurs, deux Lords anoblis et respectés par toute une profession, par tout un art. Deux monuments du cinéma qui ne se rencontreront qu’une seule fois sur grand écran, Connery & Caine. Deux amis et deux icônes qui n’hésitèrent pas à s’immiscer dans le script pour lui donner l’envergure qu’il insuffle, voilà 36 ans, sans esquisser une once de ride. Deux monuments émérites dont la filmographie est aussi édifiante qu’exhaustive, mais pour qui, L’homme qui voulut être roi restera, selon leurs propres dires, comme leur plus grand chef d’œuvre.

Diego C.

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