mardi 29 mars 2011

Apocalypse

Un titre choc à prendre au premier degré pour un documentaire édifiant.

Je le dis d’emblée : non, il ne s’agit pas d’un énième documentaire sur la Seconde Guerre Mondiale. Cela fait deux fois maintenant que je le visionne et mon sentiment est constant : s’il fallait n’en garder qu’un seul sur le sujet, ce serait celui-là, assurément.

Isabelle Clarke et Daniel Costelle, les coréalisateurs nous donnent  à voir des images inédites, d’une exceptionnelle pertinence et de grande qualité sur cette tragédie qui a touché le monde il y a quelques décennies.

Ici, on met de côté les fantasmes sur le déroulement des évènements et les préjugés hâtifs sur l’état psychologique des peuples qui ont belligéré pendant quatre interminables années. Point de jugement donc ? Pas vraiment. Le documentaire ne revendique pas un pseudo objectivisme que d’aucuns invoquent pour aborder les sciences humaines. Bien au contraire, ce documentaire est riche parce qu’il aborde la guerre avec un regard multiple, celui de l’individu et de la foule, du politique et du militaire, de la doctrine et de la réalité, de l’horreur et de l’espoir, et ce, dans tous les camps.

C’est l’humanité toute entière au plus profond de ses turpitudes qui est le véritable objet de ce documentaire. Celui-ci est exceptionnel parce qu’il est plurisubjectif et polymorphe. Aucun point de vue n’est laissé pour compte. Vous voulez comprendre la guerre ? Alors il faudra la regarder du présupposé « bon côté », mais aussi du côté de vos faiblesses et du côté de « l’ennemi », celui que vous abhorrez et qui pourtant, est bien votre semblable.   

Pas d’onanisme ici ! Si nous sommes là, c’est au nom de l’histoire, pour qu’elle soit dite, sous toutes ses formes.

Et puis, il y a la voix de Kassovitz qui nous guide et nous enseigne pendant ces cinq heures. Il nous conduit avec professionnalisme à travers ces explosions de terreur et d’effroi. Kassovitz le professeur, celui qui transmet, grave et pédagogue. On l’écoute avec passion et respect parce qu’il nous fait prendre conscience de la dimension et de la teneur des évènements qu’il relate.

Enfin, il y a la colorisation des images. Sensationnel. Il y a là un travail méticuleux qui se compte probablement en centaines d’heures. Le résultat est remarquable. En fait, le voilà le véritable argument de ce documentaire. La colorisation des images nous donne l’effet d’une bombe, au sens propre, comme au sens figuré. 

Fini les images ternes et grisâtres de la guerre qui nous permettaient de nous réfugier dans le confort de nos canapés pour ne pas voir la réalité de ce qu’elle est. C’est un choc absolu. L’horreur est bien de ce monde. Et chose encore plus frappante : depuis 70 ans, nous sommes les mêmes ! Qu’est-ce qui a changé ? La mode ? Si peu. La technologie ? A peine : les voitures ne sont plus des rectangles sur roues, elles ont des « lignes » courbées et le téléphone portable a fait son apparition. Bref, matériellement, rien n’a changé.


Est-ce le problème ? Pas vraiment, à condition de ne pas passer à côté de ce que nous montre toute cette couleur : la part d’histoire qui fait partie de notre temps, de notre époque. Elle est contemporaine et probablement intemporelle.

Cette histoire est la notre parce, qu’elle émane d’une partie de l’essence de l’humain : l’horreur. Ces images nous crèvent les yeux parce qu’elles nous montrent à quel point nous sommes tous, tour à tour intrinsèquement oppresseurs et opprimés.  


C’est le poids de la Guerre qui est en chacun de nous et qui nous brûle les yeux à travers ces images d’une rare intensité. Si nous en prenons conscience et que nous acceptons de le porter, alors, nos yeux pourtant si fragiles renaîtront comme des bourgeons au printemps. Ils seront bleus, comme l’espoir, comme l’océan.

Maxime D.


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